11:58 - Mardi 16 juillet, 2024

- 9. Muḥarram 1446

Une bonne situation dans cette vie et dans l’autre


En effet, s’il est obligatoire, islamiquement parlant, de rechercher la réussite spirituelle car celle-ci est prioritaire sur la réussite matérielle, comme Allah le confirme après avoir évoqué la nomination de Joseph comme ministre : Et la récompense de l’au-delà est meilleure pour ceux qui ont cru et ont pratiqué le piété [12;57] ; il n’en demeure pas moins, que la recherche de la réussite matérielle et sociale demeure souhaitable, voir recommandée, tant celle-ci permet d’apporter du bien autour de soi, de pratiquer dignement sa religion et de présenter celle-ci de la meilleure manière aux gens.

Il n’y a dans notre religion aucune contradiction entre le temporel et le spirituel. Au contraire de nombreux textes prouvent que les hommes les plus comblés sont ceux ont reçu les bienfaits spirituels et matériels : le savoir et le pouvoir, la sagesse et la richesse ; quand ceux-ci sont bien acquis et utilisés à bon escient. Le Prophète paix et salut sur lui dit : Les hommes sont de quatre catégories… Le meilleur est celui qui a reçu un savoir [religieux], et une richesse qu’il dépense selon ce savoir [Al Boukhari]. Il dit aussi paix et salut sur lui, d’après Ibn Omar : La jalousie n’est permise que dans deux cas : un homme qui a reçu un savoir et qui le met en pratique, et un homme qui a reçu une fortune et qui la dépense dans ce qui attire la Satisfaction Divine [Al Boukhari & Mouslim]. Et Anas nous rapporte que l’invocation que faisait le plus fréquemment l’Envoyé de Dieu paix et salut sur lui était : Ô notre Dieu… Donne-nous une belle part dans cette vie et une belle part dans l’autre et préserve-nous du châtiment du feu ! [Al Boukhari & Mouslim].

Le faux ascétisme. Parmi les savants de la Sounnah, Ibn al Jawzy est l’un de ceux qui a blâmé avec force d’arguments les adeptes d’un ascétisme importé, et non-islamique qui considère l’acquisition des biens comme réprouvé ou haram. Ainsi Ibn al Jawzy, rejette-t-il le hadith selon lequel Abd Al Rahman Ibn ‘Awf rentrerait au Paradis en rampant du fait qu’il ait été un homme aisé et fortuné. De par sa chaîne de transmission, le hadith n’est pas authentique, explique-t-il, du fait qu’il est rapporté par Ammara Ibn Zadhan, que les spécialistes, tels Al Boukhari, Al Daraqoutni ou Ahmad récusent. Quant à son sens, il est aberrant qu’Abd Al Rahman Ibn Awf – l’un des premiers convertis, l’un des dix auxquels l’Envoyé d’Allah paix et salut sur lui a promis le Paradis [Al Tirmidhi]le bienfaiteur qui pris en charge les femmes du Prophète après sa mort [Ahmad], qui était parmi les gens de Badr, auxquels Dieu a dit : Œuvrez comme bon vous semble, Je vous ai pardonné [Al Boukhari & Mouslim], et qui faisait parti du conseil consultatif du Prophète paix et salut sur lui – il est impensable, que ce compagnon soit soumis à cette épreuve du fait de sa fortune qu’il a acquis légalement et n’a eu de cesse de la dépenser dans ce que Dieu aime et agrée : Ceux qui, de nuit et de jour, secrètement et publiquement, dépensent leurs biens, ont leur salaire auprès de leur Seigneur. Ils n’ont rien à craindre et ils ne seront point affligés [2;274]. Ibn Al Jawzy argumente ensuite sa position en rappelant entre autre que Talha a laissé en héritage trois cents mille cargaisons dans chacune trois quintaux ; qu’Al Zoubayr a laissé cinquante millions et deux cents mille ; qu’Ibn Mass’oud a laissé quatre-vingt dix mille et que beaucoup de compagnons ont acquis des biens et les ont laissés en héritage et qu’aucun d’entre eux n’a désapprouvé l’autre.

Le véritable ascétisme consiste à ne pas s’attacher au matériel. Tous les textes qui vantent les mérites de l’ascétisme et du renoncement au bas monde visent à nous rappeler que les biens licites ne sont qu’un moyen et non une fin en soi ; et que nous ne devons pas laisser la recherche ou l’accumulation de ceux-ci, nous détourner de la Satisfaction de Dieu et de l’au-delà. Ils visent également à apaiser la personne éprouvée dans ses biens ou qui n’arrive pas à s’en sortir, ou qui, pour un motif religieux, a dû renoncer à l’excès et au superflu, pour s’engager corps et âmes dans la recherche du savoir, la prédication, etc. C’est dans ce sens que l’Envoyé d’Allah paix et salut sur lui a dit : Sois dans ce monde comme si tu étais un étranger ou quelqu’un de passage [Al Boukhari], c’est-à-dire : ne t’y attache pas trop et ne le laisse pas te détourner de ton itinéraire, souviens-toi que ta destination est l’au-delà et que ton retour se fera auprès d’Allah.

Et Allah sait mieux !


Rubrique: Autour de la sourate Youssouf