22:05 - Dimanche 22 décembre, 2024

- 20. Jumādā al-Ākhira 1446

Tirer les conséquences de ses erreurs


Allah le Très Haut dit : Dieu vous a déjà secourus en maints endroits. Et [rappelez-vous] le jour de Hounayn, quand vous vous êtes laissés abuser par votre grand nombre et que cela ne vous servit finalement à rien. La terre pourtant si vaste vous parut tout à coup bien étroite ; puis vous tournâtes le dos en fuyards [9;25]. Ce verset nous relate ici la défaite des musulmans, pourtant conduits par le Prophète (paix et salut sur lui), alors que ceux-ci s’imaginaient de prime abord victorieux, lors de l’épisode de Hounayn.

Le lecteur attentif du Coran peut observer en de nombreux passages les « reproches » que Dieu adresse parfois à la dernière de Ses communautés, qui est notre communauté musulmane. Plutôt que de lire ces versets comme des condamnations, nous devons plutôt comprendre ces « critiques » de la part de Dieu, dans leur sens positif. En effet, celles-ci visent à éduquer la première génération, celle de l’Envoyé de Dieu (paix et salut sur lui), puis les générations qui lui succèderont, jusqu’à la nôtre. Ces invectives nous enseignent le plus souvent à tirer des leçons de nos échecs, non pas en accusant l’autre, mais plutôt en cherchant les failles et les erreurs qui, chez nous, en sont la cause.

Immédiatement après la première grande défaite des musulmans, lors de la confrontation d’Ouhoud, Dieu révéla une série de versets dans la sourate Al Imran pointant les erreurs des musulmans. À aucun endroit, le Coran ne mentionne la puissance de Qouraysh, ou l’intelligence tactique de Khalid Ibn Walid, pour leur faire porter la responsabilité de la défaite des musulmans. Après avoir évoqué le fait que Dieu a tenu sa promesse vis-à-vis des croyants en leur donnant le dessus au départ, le Coran explique ainsi le revirement brutal qui entraîna la défaite des croyants : puis vous fléchîtes, et vous vous disputâtes au sujet de l’ordre donné. Vous avez désobéi (au commandement) après avoir entrevu la victoire que vous convoitiez. La dispute, la discorde et le manque de discipline sont désignés ici comme les causes apparentes de la débâcle. Puis, Dieu nous explique l’origine plus profonde de tout cela, en mettant en évidence l’aspect spirituel, psychologique : Il en était parmi vous qui désiraient la vie d’ici bas et il en était parmi vous qui désiraient l’au-delà. Or la promesse Divine ne peut s’accomplir que si et seulement si, nous nous accrochons fermement à Ses directives et Ses commandements, avec sagesse, sans précipitation et sans exagération. Dès lors qu’une partie non négligeable des croyants a fléchi et a désobéi, la promesse de Dieu ne s’appliquait plus : Puis Il vous a fait reculer devant eux, afin de vous éprouver. Enfin, l’aspect positif de cette « critique » de Dieu, apparaît dans la fin du verset, qui loin de condamner les musulmans, les encourage à se remettre en cause et à s’améliorer : Et certes Il vous a pardonné. Et Dieu est Détenteur de la grâce envers les croyants [3;152-153]. Quelques versets plus loin, Dieu nous confirme la règle qui consiste à chercher la justification de nos malheurs dans nos propres manquements, plutôt que d’accuser l’autre, qui ne fait au final que jouer son rôle : Quoi ! Quand un malheur vous atteint – mais vous en avez jadis infligé le double – vous dites ‘D’où vient cela ?’ Réponds-leur : ‘Il vient de vous-mêmes’. Certes Dieu est Omnipotent [3;165].

Les erreurs des croyants mentionnées dans le Coran ne relèvent pas que d’un seul domaine. Dans la sourate La lumière est, par exemple, évoqué l’empressement et le manque de clairvoyance de certains croyants, musulmans sincères, qui se sont, pendant quelques jours, mis au niveau des faux-musulmans, les hypocrites, et se sont faits les propagateurs de la rumeur, nourrissant le feu de la grande calomnie : Pourquoi, lorsque vous l’avez entendue [cette calomnie], les croyants et les croyantes n’ont-ils pas, en eux-mêmes, conjecturé favorablement, et n’ont-ils pas dit : ‘C’est une calomnie évidente’ ?! (…) quand vous colportiez la nouvelle avec vos langues et disiez de vos bouches ce dont vous n’aviez aucun savoir ; et vous le comptiez comme insignifiant alors qu’auprès de Dieu cela est énorme… [Voir 24;11 à 21]. Ici, comme en d’autres passages, le Coran nous apprend aussi à garder un œil critique sur l’information, à analyser les sources de celle-ci avant de la rapporter. De plus, dans ce passage le cas des hypocrites qui furent à l’origine du mal est survolé rapidement, tandis que les versets s’attardent sur le cas des vrais croyants, afin de les éduquer et de corriger leurs travers.

Nous voyons donc, qu’en plus de nous inviter à une introspection au niveau individuel, l’Islam nous encourage à faire cet exercice au niveau collectif, afin de comprendre nos erreurs : revisiter notre histoire, pour connaître son âge d’or, et les apports de notre communauté au patrimoine de l’humanité ; et à l’inverse reconnaître nos erreurs afin de nous repentir ; et cela n’est en rien humiliant de notre point de vue. Le but de cela ne doit pas être de s’auto-flageller ni de tomber dans le piège du désespoir qui nous paralyse et nous empêche d’accomplir tout projet, de construire, et de faire le bien. L’objectif de ce travail sur nous-mêmes, doit au contraire être de repartir de plus belle, de s’améliorer constamment afin de relever les défis du moment, de mieux se conformer aux commandements de Dieu compris à la lumière des réalités de l’époque. Alors seulement, pourrons-nous remporter les victoires que l’on espère. Si Dieu vous donne Son secours, nul ne peut vous vaincre. S’Il vous abandonne, qui donc après Lui vous donnera secours ? C’est à Dieu que les croyants doivent faire confiance [3;160].


Rubrique: Se réformer