Nous avons vu le mois précédent que malgré leur infériorité numérique lors de la bataille d’Ouhoud, les musulmans avaient réussi à prendre le dessus sur l’armée Mecquoise, et ce grâce à la stratégie du Prophète (paix et salut sur lui) et à la bravoure incomparable de ses compagnons. Les Mecquois n’arrivant pas à trouver d’ouverture ne cessaient de reculer et commencèrent même à fuir, laissant derrière eux tout ce qui pouvait les ralentir. Les archers auxquels le Prophète (paix et salut sur lui) avait ordonné de tenir leur position quoiqu’il advienne se réjouissaient, du haut de leur colline, de la débâcle des Mecquois et d’une victoire qu’ils pensaient acquise.
Ainsi, dans un excès de confiance, et attirés par les biens du bas monde, une partie des archers quitta sa position pour rejoindre le champ de bataille et participer à la récolte du butin, négligeant les directives du Prophète (paix et salut sur lui), et ignorant les rappels à l’ordre de leur chef, Abdoullah ibn Joubeyr, (…) jusqu’au moment où vous avez fléchi, où vous vous êtes disputés à propos de l’ordre donné, et vous avez désobéi après qu’Il vous eut montré (la victoire) que vous aimiez ! [3;152]. Khalid ibn Al Walid, le chef des cavaliers Mecquois et encore idolâtre à cette époque, avait observé la scène attentivement, et donna immédiatement l’ordre de contourner la colline pour attaquer par cette brèche, le peu d’archers qui étaient resté en position et ainsi prendre l’armée musulmane en tenaille. Malgré la résistance des archers, il ne fallut pas beaucoup de temps à Khalid ibn Al Walid et à ces hommes pour briser l’arrière-garde fragilisée de l’armée des croyants, et ainsi inverser le cours de la bataille. Voyant ce revirement, les fuyards Mecquois reprirent le combat, assaillant les musulmans de tous les côtés, ce qui provoqua un mouvement de panique, et une désorganisation totale dans les rangs des croyants. Les idolâtres profitèrent de l’anarchie pour concentrer leurs attaques sur le Prophète (paix et salut sur lui) qui fut blessé au visage. Dans l’agitation générale, la rumeur de sa mort se propagea au sein de ses troupes, et c’est à ce moment que la confusion atteint son apogée. Là, Anas ibn Nadr lança à certains de ces compagnons au bord de l’abandon : ‘Et que vaut la vie après lui ? Levez-vous et mourez pour la même cause que lui’, puis se remit au combat avec encore plus de fougue, jusqu’à tomber en martyr. ‘Mohammad n’est qu’un messager ; des messagers avant lui sont passés. S’il mourait, donc, ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos talons ? Quiconque retourne sur ses talons ne nuira en rien à Allah ; et Allah récompensera bientôt les reconnaissants.’ [3;144].
Pendant ce temps, d’autres compagnons dont la foi était profondément enracinée étaient restés auprès du Prophète (paix et salut sur lui), pour le défendre au péril de leur vie, à l’image d’Abou Talha, ou encore Abou Doujana qui n’hésitèrent pas à le couvrir de leur propre corps pour assurer sa protection. Peu à peu tous se regroupèrent autour du Prophète (paix et salut sur lui), et la confusion causée par la rumeur de sa mort finit par se dissiper pour laisser place à nouveau au courage et à l’espoir qui allaient permettre de repousser les assauts des qorayshites, et transporter le Prophète (paix et salut sur lui) en une position sécurisée. ‘Puis Il fit descendre sur vous, après l’angoisse, la sécurité (…)’ [3;154].
Les Mecquois, épuisés par ces affrontements, n’en pouvaient plus face à ce regain d’énergie des musulmans, et préférèrent quitter le champ de bataille alors qu’ils avaient le dessus, et partir sur un semblant de victoire.
Soixante-dix musulmans tombèrent en martyrs ce jour là et furent enterrés sur le lieu des combats, d’où la place particulière qu’occupe la montagne d’Ouhoud dans le cœur des musulmans ; ‘Ouhoud est une montagne qui nous aime et que nous aimons’ [Al Boukhari & Mouslim].
A peine rentré, le Prophète (paix et salut sur lui) décida de repartir à la rencontre de l’armée qorayshite qui hésitait à revenir sur ces pas pour attaquer Médine, ce qui eu pour conséquence de les faire fuir définitivement. Certes ceux auxquels l’on disait : ‘Les gens se sont rassemblés contre vous ; craignez-les’ – cela accrut leur foi – et ils dirent :’Allah nous suffit, Il est notre meilleur garant’ [3;173].
Nous avons vu qu’à Badr, Allah avait tranché entre l’unicité et le polythéisme en accordant une victoire éclatante aux musulmans sur les idolâtres. À Ouhoud, Allah a distingué explicitement les croyants sincères des hypocrites, en dévoilant leurs mauvais sentiments face à l’épreuve, lorsque ces derniers désertèrent les rangs avant la bataille. Il a également voulu, par la défaite, enseigner à ses fidèles le prix de la désobéissance au Prophète (paix et salut sur lui).
Ainsi faisons-Nous alterner les jours (bons et mauvais) parmi les gens, afin qu’Allah reconnaisse ceux qui ont cru, et qu’Il choisisse parmi vous des martyrs – et Allah n’aime pas les injustes [3;140]