C’est à Bassora, en 260H, 19 ans après la mort de l’imam Ahmad ibn Hanbal [qui de tout son être s’était opposé à la tyrannie sectaire des mu’tazilites] que naquit Abou al Hasan al ‘Ach’ari, célèbre théologien et descendant du noble compagnon Abou Mûsâ al ‘Ach’ari.
Bien que marginalisés et ne bénéficiant plus des faveurs du pouvoir, l’influence des mu’tazilites continuait à se propager dans les populations musulmanes. C’est dans ce contexte que grandit al ‘Ach’ari. Il étudia les sciences religieuses auprès des plus grands maîtres de Bagdad. Par ailleurs il reçut son savoir en matière de théologie spéculative (kalam) auprès de son beau père, le sheikh des mu’tazilites, Abû ‘Ali al Jubbâ’i. Juriste, traditionniste, Abou al Hasan devînt peu à peu un polémiste hors pair ; fervent défenseur de la doctrine mu’tazilite qui considérait que la Révélation était entièrement appréhendable par la raison humaine. De nombreux versets du Coran appellent en effet l’Homme à la réflexion et à la raison: ‘C’est ainsi qu’Allah vous explique Ses versets, afin que vous raisonniez’ (2,242) ou Seuls les doués d’intelligence se rappellent ‘(39,9). Néanmoins, décrivant Son livre, Allah a différencié les versets explicites ’qui sont la base du Livre’ (3,7) des versets équivoques dont ‘nul n’en connaît l’interprétation, à part Allah (3,7). Ainsi, le croyant doit-il s’efforcer de comprendre au mieux la Révélation au moyen de son intelligence mais sans oublier que Dieu détient un Savoir Absolu et que certains versets ne peuvent être compris par un raisonnement rationnel. Les mutazilites n’acceptaient pas ce principe. Pour exemple, par peur d’anthropomorphisme, ils tentaient d’interpréter les attributs Divins par la raison. Cette méthode les amena à des conclusions absurdes et à rejeter le sens de certains attributs car les lois s’appliquant aux créatures ne peuvent être appliquées au Créateur. Pour eux, Allah était ainsi le Voyant sans vue ou encore l’Audient sans ouïe !!
Jusqu’à l’âge de 40 ans, Abou al Hasan défendit les thèses mu’tazilites mais au fur et à mesure de son cheminement intellectuel le doute et le scepticisme se mirent à l’envahir. On rapporte qu’une nuit, en proie au doute au sujet d’une question doctrinale, il se leva et accompli deux unités de prière afin d’être guidé. Et votre Seigneur dit : “Appelez-Moi, Je vous répondrai (40,60). Après s’être rendormi, il vit en songe le Prophète – paix et salut sur lui – qui lui conseilla de s’en tenir à sa tradition. Abou al Hasan prit note de ce conseil et renvoya toute question au Livre et à la Sunna. Après mûre réflexion, il se présenta en public et dit en se déshabillant de l’habit qu’il portait : ‘je me débarrasse de l’école mu’tazilite tout comme je me débarrasse de cet habit’. Puis, il affirma son attachement au credo de l’imam Ahmad qui n’est autre que la croyance juste du Prophète – paix et salut sur lui, des compagnons et des premières générations. Dès lors et jusqu’à la fin de sa vie, il consacra toute son énergie à s’opposer à la pensée mu’tazilite.
Dans son târikh Baghdad, l’imam al khatîb écrivit : Les Mu`tazilites avaient levé la tête jusqu’au jour où Dieu fit apparaître Al-Ash`arî qui les relégua dans les profondeurs des abysses. La Sagesse Divine voulut que l’un de leurs plus grands savants devienne leur plus fervent adversaire. Abou al Hasan rédigea notamment son célèbre ouvrage Maqâlât Al-Islâmiyyîn Wakhtilâfât Al-Musallîn dans lequel il recensa toutes les sectes musulmanes. Il les classifia, en fit une présentation rigoureuse puis évalua la justesse de leurs thèses. Il mit ensuite en évidence leur égarement sous l’autorité des Textes et à partir de leurs propres arguments. Pour finir, il présenta sa propre doctrine. L’imam ‘Ach’ari n’a cependant rien apporté de nouveau mais il a présenté avec excellence la croyance musulmane dans un style adapté aux polémiques de son temps. Le présentant comme le maître dans la science des fondements (usûl), de nombreux savants tels Ibn Kathir, Ibn ‘Asakir, ont rédigé des biographies à son sujet, notamment pour démentir tous les mensonges portés sur l’imam ; mensonges persistants encore jusqu’à aujourd’hui.
Âgé de 62 ans, Abou Al Hasan al ‘Ach’ari fut rappelé à son Seigneur en 322H.
Qu’Allah lui fasse miséricorde et lui accorde une place très proche auprès de Lui !