Nous achevons ici notre thématique sur le sujet de l’amour dans l’Islam. Après avoir démontré que la foi n’est pas parfaite tant que l’on n’aime pas Dieu plus que tout, que l’on aime pas le Prophète - paix et salut sur lui - qu’il a choisi, plus que l’ensemble des créatures, nous-mêmes, nos parents et nos enfants compris ; après avoir assimilé le fait que la foi impose le fait d’aimer les gens pieux, à la tête desquels sont les prophètes, les compagnons, et les hommes et femmes dévoués de chaque génération ; de même que la foi impose des limites et des conditions au fait d’aimer ce qui va à l’encontre de Dieu ou peut nous détourner de Lui, nous ne pouvons pas achever notre série sans aborder l’amour sain et naturel, que Dieu a placé entre hommes et femmes.
Allah dit : parmi Ses signes Il a créé à partir de vous et pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l’amour et de la clémence. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent [21;30]. Ce verset affirme que la sérénité, la douceur et les sentiments qu’il y a entre les époux font partie des ‘signes’ qui témoignent de Son existence, de Sa sagesse et de Sa grande miséricorde à notre égard ; à condition bien sûr de méditer sur ce sujet. Dans un autre passage, Dieu définit la relation de proximité, de protection mutuelle, de chaleur que doivent s’apporter hommes et femmes en donnant cette belle image : elles sont tel un vêtement pour vous et vous êtes tel un vêtement pour elles [2;187]. Le vêtement a la particularité d’être très proche de nous, de couvrir ce que l’on cache, d’embellir nos apparences, de nous tenir chaud lorsqu’il fait froid et de nous protéger de l’environnement extérieur.
Le Coran évoque enfin le désir des gens pieux de trouver dans leurs conjoints une source de bonheur, et l’amour entre époux fait certainement partie des principaux facteurs qui favorisent l’émergence de ce bonheur : Les serviteurs du Miséricordieux (…) sont ceux qui disent : Ô notre Dieu, accorde-nous donc, en nos conjoints et nos descendants, une source de bonheur, et fais de nous un modèle de piété [25;74].
Nous comprenons donc que l’amour entre hommes et femmes – lorsqu’il n’a pas pour origine la désobéissance à Allah et qu’il ne conduit pas non-plus à celle-ci – est un sentiment noble et en rien honteux. Nous pouvons à ce titre citer la parole du Prophète - paix et salut sur lui - : je ne vois rien de mieux pour les amoureux que le mariage [Ibn Majah, Al Bayhaqi ; Sahih], qui confirme la parfaite normalité de ce sentiment. Ibn Hazm que l’on connaît avant tout pour être un grand érudit et un juriste, s’est aussi révélé être un grand psychologue et connaisseur de la nature humaine dans son livre Le collier de la colombe, consacré au sujet de l’amour entre hommes et femmes. Il écrit dans son introduction que l’amour n’est absolument ‘pas condamné par la religion, ni prohibé par les Textes, car Allah Puissant et Grand dispose comme Il le veut de nos cœurs’. Le savant andalou, du 4ème-5ème siècle de l’Hégire, décrit ensuite comment naît le sentiment amoureux et comment il se manifeste, s’appuyant sur sa propre expérience [pieuse] ; rapportant de nombreux récits de pieux et d’illustres personnages de son époque ; avant de conclure sur l’importance de craindre Dieu et de ne pas perdre de vue le but de notre existence.
Ceci étant, nous devons savoir que les meilleurs des êtres humains, parmi les prophètes et les saints ont aimé. Cela relève de la nature humaine. Dieu nous dit au sujet des femmes veuves que l’on souhaiterait épouser : On ne vous reprochera pas de faire, aux femmes, allusion à une proposition de mariage, ou d’en garder secrète l’intention. Dieu sait que vous allez songer à elles [2;235]. Il dit aussi : On a enjolivé aux gens l’amour de ce qu’ils désirent : femmes, enfants, trésors thésaurisés d’or et d’argent, chevaux marqués, bétail et champs [3;14].
On interrogea un jour le meilleur des hommes qu’est le Prophète - paix et salut sur lui - en ces termes : qui est la personne que tu aimes le plus parmi les êtres humains ? L’Envoyé de Dieu - paix et salut sur lui - n’a pas eu honte de répondre, sans hésitation : Aïcha [sa femme] [Al Boukhari]. Cet amour était bien évidemment réciproque et les hadiths mentionnant les marques de complicité et d’affection entre eux sont nombreux.
Par ailleurs, Aïcha mentionne ces sentiments qu’elle avait pour son époux - paix et salut sur lui - ; et nous laisse entrevoir l’amour que celui-ci avait eu pour sa première épouse Khadija en disant : Je n’ai jamais éprouvé de jalousie vis-à-vis des épouses du Prophète - paix et salut sur lui - comme j’en ai éprouvé vis-à-vis de Khadija alors que je ne l’avais jamais vue. Il ne cessait en effet de parler d’elle. Quand il sacrifiait un agneau, il lui arrivait de le couper en morceaux pour les envoyer aux anciennes amies de Khadija. Il m’est peut-être arrivé de lui dire : ‘On dirait qu’il n’existe au monde d’autres femmes que Khadija !’ Il disait : ‘Elle était comme ceci, elle était comme cela et c’est d’elle que j’ai eu des enfants’ [Al Boukhari & Mouslim].
De plus, il est important de constater que les Textes, du Coran et de la Sounnah, ont évoqué de manière plus ou moins explicite ce sujet, sans pour autant s’y attarder outre mesure. Nous comprenons de cela que la recherche de l’amour ne doit pas devenir le but de notre existence, à l’instar de ces personnages de films ou de romans, ou encore de ces poètes au sujet desquels le Coran dit : quant aux poètes, ce sont les égarés qui les suivent. Ne vois-tu pas qu’ils divaguent dans chaque vallée, et qu’ils disent ce qu’ils ne font pas ? [26;224-226].
Enfin, le Coran évoque aussi une autre forme d’amour qui n’est pas saine ni raisonnable : l’amour passionnel. Celui-ci tire souvent son origine dans la désobéissance aux règles morales fixées par le Créateur, et pousse celui ou celle qui en est victime à commettre des péchés et des transgressions. L’exemple bien-connu cité par le Coran est celui de la femme qui s’est éprise du prophète Youssouf. Le Livre ne mentionne pas comment celle-ci est tombée amoureuse de celui qui n’était que son employé, mais nous décrit comment cet amour l’a poussée progressivement à la trahison et à la débauche, puis au mensonge et à la ruse, et finalement à la haine et à l’injustice ! C’est pour cela que ce genre d’amour passionnel fut considéré par les gens de l’époque – et le Coran a validé ce jugement – comme une forme de folie et comme un égarement manifeste : Et dans la ville, des femmes dirent : La femme d’Al-Azize essaye de séduire son valet ! Il l’a vraiment rendue folle d’amour. Nous la trouvons certes dans un égarement évident [12;30].
Et Allah sait mieux !