Nous avons donné sur les deux précédents articles une description générale du Coran. Nous traiterons ici, incha Allah,de la manière dont le texte coranique fut transmis. Pour cela, l’étude de l’assemblage du Coran (jam’ al qour’an) permet de comprendre comment le Livre de Dieu fut préservé puis transmis fidèlement aux générations venues après la Révélation. En somme, comment le moushaf que nous détenons aujourd’hui entre nos mains est parvenu jusqu’à nous. La transmission et la préservation du Coran du temps du Prophète (paix et salut sur lui) se faisaient au travers de deux moyens que sont la transmission orale, basée sur la mémorisation du Texte (hifz), et la consignation par écrit des versets révélés, par l’intermédiaire de scribes officiellement assignés à cette tâche par le Messager (paix et salut sur lui).
La mémorisation.
Le Prophète (paix et salut sur lui) fut le premier à mémoriser la Révélation comme cela est mentionné dans le Coran : Ne te précipite pas pour réciter tout verset que Nous te révélons. Son assemblement dans ton cœur (sa fixation dans ta mémoire) Nous incombe, ainsi que la façon de le réciter. Donc, quand Nous le récitons, suis sa récitation. À Nous ensuite incombera son explication [75;16-19]. Nous te ferons réciter (le Coran), de sorte que tu n’oublieras que ce qu’Allah aura voulu [87;6-7]. Une fois qu’un verset ou une sourate était révélé, le Prophète (paix et salut sur lui) l’enseignait publiquement aux croyants et aux croyantes. De nombreux hadiths attestent qu’à la Mecque, dès les débuts de l’Islam, des compagnons récitaient les versets qu’ils avaient entendus de la bouche du Messager de Dieu (paix et salut sur lui). Nous pouvons citer à titre d’exemple le hadith dans lequel Abdallah ibn Mass’oud récita dans l’enceinte Sacrée la sourateLe Tout Miséricordieux afin que le Coran soit clairement entendu des notables mecquois, qui se ruèrent finalement sur lui et le passèrent à tabac. Les compagnons mémorisaient aussi des passages du Coran qui étaient récités plusieurs fois par le Prophète (paix et salut sur lui) au cours des prières quotidiennes. Il arrivait même que ce soient les compagnons qui récitassent le Coran à Mohammed (paix et salut sur lui) comme lorsque ce même Ibn Mass’oud psalmodia à la demande du Messager de Dieu (paix et salut sur lui) la sourate ‘les femmes’ jusqu’à ce que le Prophète (paix et salut sur lui) lui demanda de s’arrêter, les yeux débordants de larmes [Al Boukhari]. Par ailleurs, l’Envoyé d’Allah (paix et salut sur lui)encouragea fortement la mémorisation : le meilleur d’entre vous est celui qui a appris le Coran puis l’a enseigné [Al Boukhari] ; et mettait en garde contre le fait de délaisser la récitation : le familier du Coran est semblable au propriétaire d’une chamelle entravée. Si on ne relâche pas son attention on la gardera mais si on la néglige, elle s’échappera [Al Boukhari]. Mohammed (paix et salut sur lui) recommanda aussi quatre de ses compagnons pour l’apprentissage du Coran : prenez le Coran de quatre personnes : Abdallah Ibn mass’oud, Salim, Mou’adh et Oubay Ibn Ka’b [Al Boukhari].Il dépêcha également à Médine, avant l’émigration (hijra), Mouss’ab Ibn ‘Oumayr qui était surnommé le lecteur (qâri) et le chargea d’enseigner aux gens le Coran et les préceptes de l’Islam. Tous ces textes attestent que la mémorisation de la Révélation était répandue parmi les musulmans, et ce, dès le départ.
Le hadith de Anas.
En outre, Anas Ibn Malik déclara que quatre compagnons réunirent (jama’a) le Coran dans sa totalité du vivant du Prophète (paix et salut sur lui), tous parmi les Ansars. Il s’agit de Oubay Ibn Ka’b, Mou’adh Ibn Jabal, Zayd Ibn Thabit et Abou Zayd [Al Boukhari]. Au vu de ce qui précède, ce hadith peut paraître surprenant car comme nous l’avons souligné, la mémorisation était encouragée et répandue, permettant une transmission par de nombreuses voies (tawatour). Sans compter qu’il ne figure dans cette liste aucun musulman mecquois (mouhajir) tandis que les quatre compagnons cités étaient tous Ansar, donc convertis à l’Islam plus de dix ans après le début de la Révélation. Cependant, les savants de l’Islam ont expliqué que ce hadith ne doit pas être compris comme étant exhaustif. En effet, le verbe jama’a peut avoir une signification plus vaste que la simple mémorisation. Plusieurs hypothèses ont été avancées. Nous retiendrons simplement qu’Anas n’a mentionné que les compagnons qu’il connaissait et dont il savait qu’ils avaient mémorisé entièrement le Livre de Dieu. Par ailleurs, Al Boukhari rapporte qu’Abou Bakr, après la mort du Prophète (paix et salut sur lui), entreprit l’assemblage du Coran suite aux guerres où de nombreux compagnons ayant mémorisé le Coran(houfaz) perdirent la vie, ce qui lui fit craindre que le Livre ne finisse par se perdre. Tout cela corrobore le fait que beaucoup parmi les disciples du Prophète (paix et salut sur lui) mémorisèrent le Coran en entier. Pour conclure, nous pouvons dire que le Livre fut préservé en partie ou en totalité dans la mémoire des croyants ou dans leurs cœurs dirons-nous plutôt. Nous verrons ensuite, si Dieu le veut, comment il fut aussi préservé par le biais de l’écriture.
Et Allah sait mieux.