14:26 - Samedi 21 décembre, 2024

- 19. Jumādā al-Ākhira 1446

La consécration à Dieu (al ikhlas)


Allah le Très Haut fait dire aux croyants dans Son Livre : dis : débattrez-vous avec nous au sujet de Dieu, qui est notre Maître tout comme le vôtre, tandis que nous avons notre manière d’agir et vous avez la vôtre, et nous Lui sommes entièrement dévoués [2;139], dis : on m’a prescrit de servir Dieu, en me consacrant totalement à la religion [39;11]. Il dit aussi, évoquant le cas de ceux qui avaient oublié le principe de base de la religion : nous ne leur avions pourtant ordonné que de se montrer dévoués envers Dieu dans leur culte… [98;5]. Le Coran nous relate également en plusieurs passages le débat qui eut lieu entre Allah et la créature rebelle et égarée, Iblis qui dit : Mon Dieu, puisque Tu m’as induit en erreur, je (le diable) leur embellirai (aux êtres humains) (les choses mauvaises, immorales et interdites) qui sont sur Terre et les tromperai tous, exception faite de Tes serviteurs dévoués [15;38-40]. Ceci étant dit, al ikhlas, que l’on traduit généralement par ‘la sincérité’ ou par ‘le monothéisme pur’, et que nous avons choisi de traduire par la consécration/dévotion totale à Dieu, est, quelle que soit la définition ou traduction qu’on lui donne, un principe, ou plutôt le principe fondamental de l’Islam ; et l’on pourrait même dire qu’il est aux œuvres du cœur, ce que l’attestation de foi est, aux œuvres des membres. C’est d’ailleurs ce que suggère Ibn Al Qayyim dans son interprétation de la parole d’Allah ‘quelle meilleure profession de foi que celle de celui qui soumet son être à Dieu (en prononçant la chahada) et fait acte de bienfaisance’… [4;125] : La soumission désigne ici la pureté du dessein (al ikhlas), tandis que la bienfaisance signifie de prendre le chemin du Prophète (paix et salut sur lui) et de suivre sa Sounnah.

Al ikhlas ou l’application pratique du tawhid. Le Prophète (paix et salut sur lui) a indiqué que la sourate du Coran connue sous le nom de sourate al ikhlas, équivaut au tiers du Coran [Al Boukhari]. Pourtant cette sourate est l’une des plus courtes, en nombre de versets, puisqu’elle n’en compte que quatre, pour un total de dix-sept mots ! En fait, cette sourate représente le tiers du Coran, dans ce qu’elle synthétise la croyance musulmane (en Dieu), et résume le principe d’Unicité de Dieu (al Tawhid), qui est le premier et le plus important des objets du Message Divin (al rissala). À ce titre, nous ne pourrons réaliser al ikhlas en nous consacrant exclusivement à Dieu, sans étudier correctement et rigoureusement notre foi (imane) et notre croyance (‘aqida), afin d’assainir nos cœurs de toute forme d’association (chirk).

Al ikhlas ou le fait de vouer nos bonnes œuvres à Dieu. C’est là, la définition, ou l’aspect retenu par l’Imam Al Nawawi dans son célèbre recueil de hadith riyad al salihin : l’intention qui motive nos œuvres, doit être uniquement de plaire à Dieu – et à personne d’autre-, de gagner Sa satisfaction, et de n’attendre de rétribution ou de reconnaissance que de Lui ; en témoignent les nombreux hadiths que l’Imam rapporte dans ce chapitre qui sert d’introduction à son ouvrage, à commencer par le fameux ‘les œuvres ne valent que par les intentions qui les motivent’… [Al Boukhari & Mouslim]. Ici, al ikhlas est la condition de validité de l’intention qui, à son tour, est la condition de validité de l’acte avec la conformité à la Sounnah prophétique. Al Foudaïl Ibn ‘Iyyad commentait ainsi la parole Divine ‘…et pour mettre en évidence ceux qui agiraient le mieux [67;2]’ : la meilleure œuvre est celle qui est à la fois sincère, c’est-à-dire vouée à Dieu, et juste, c’est-à-dire conforme à la Sounnah.

Al ikhlas ou le fait de vouer sa vie entière à Dieu. C’est là, la définition qui nous paraît la plus pertinente, puisque c’est l’œuvre générale de toute notre vie qui doit être vouée à Dieu : nous (musulmans) avons notre manière d’agir et vous avez la vôtre, et nous Lui sommes entièrement dévoués [2;139]. C’est ce qui ressort de l’étude de la vie des prophètes dès lors qu’ils ont reçu la lumière de la Révélation. Dieu dit au sujet de Moussa/Moïse ce qui vaut pour l’ensemble des prophètes et messagers : mentionne Moïse dans le Livre. Il était totalement dévoué, et c’était un messager et prophète [19;51]. Qu’entend-on maintenant par le fait de vouer sa vie entière à Dieu ? Est-ce le fait de se couper du monde pour se livrer à un culte permanent comme le font certains Anges ? Non, car cela ne va pas avec notre nature humaine. Cela consiste plutôt à vivre sa vie habituelle, en ayant le souci, dans tout ce que l’on fait, comme prières, aumônes, jeûnes et autres adorations, mais aussi dans le travail que l’on exerce pour gagner nos vies, dans nos relations avec les gens et le monde qui nous entoure, de gagner la Satisfaction Divine en nous conformant à Ses commandements. C’est aussi, bien sûr, le fait de vivre avec le souci de l’Islam et du rayonnement de son Message. Dis : Certes, ma Prière, mes actes de dévotion, ma vie et ma mort appartiennent à Dieu, Seigneur de l’Univers, à Lui nul associé ! Et voilà ce qu’il m’a été ordonné, et je suis le premier à me soumettre [6;162-163].

Quels sont les fruits d’al ikhlas ? Les fruits que récolte la personne qui voue sincèrement son être à Dieu sont suaves, sucrés et juteux. L’on peut citer le fait d’être à l’abri des pièges diaboliques, de vivre une vie spirituelle épanouie, de voir ses prières exaucées, de se voir sauver dans les situations difficiles et d’être rapproché de Dieu dans les Jardins du Paradis. Le Prophète (paix et salut sur lui) dit un jour à Sa’ad Ibn Abi Waqqas : Tu ne perdras pas en accomplissant une œuvre par laquelle tu ne recherches que la satisfaction Divine ; bien au contraire tu récolteras le bien et des degrés élevés [Al Boukhari & Mouslim]. Il dit aussi (paix et salut sur lui) : il y a trois qualités qui aident le musulman à vider son cœur de la haine et de la rancune : vouer son œuvre à Dieu, bien conseiller les responsables musulmans, et rester attaché au groupe des musulmans car leurs invocations le protège [Ahmad : Sahih].

Nous et al ikhlas. Certes nous sommes musulmans et adressons de ce fait, au moins une partie de nos œuvres à Dieu. Cependant, le diable arrive souvent à corrompre nos œuvres en nous inspirant la duplicité, lorsque l’on perd de vue [la satisfaction de] Dieu dans nos actes, ou qu’on Le relègue à la seconde place, tandis que l’on recherche de prime abord les éloges, les regards, les titres, la reconnaissance, un poste, ou un salaire. L’introspection, l’autocritique, la remise en question, et les moments d’intimité avec Dieu, à l’abri des regards, semblent être l’issue à ces maux. De plus, et nous terminerons avec cela, al ikhlas, est souvent compris partiellement, en terme de croyance ou d’actes cultuels, tandis que cette qualité devrait normalement définir notre vie toute entière à partir du moment où nous avons compris le Message d’Allah : certes Dieu a acheté aux croyants leurs vies et leurs biens en échange du Paradis (…) quelle belle transaction… [9;111].

Et Allah sait mieux.


Rubrique: Se réformer