Allah – Béni et Exalté – évoque au sein du Coran Sa décision de créer l’humanité en disant : Lorsque ton Seigneur annonça aux anges : « Je vais établir sur la Terre un ‘khalifat’ ». Les exégètes expliquent que le terme ‘khalifat’ désigne ici une espèce dans laquelle les générations se succèdent les unes aux autres pour finalement disparaître chacune leur tour. Bien que cette caractéristique soit partagée par l’ensemble des espèces terrestres, animales et végétales, le terme ‘khalifat’ désigne ici l’humanité. En fait, Allah – Éxalté – fait part aux anges – créatures lumineuses, pures, puissantes, intelligentes, rigoureuses et dévouées – de Son intention d’établir une espèce dominante qui, génération après génération, colonisera et gouvernera la Terre. Allah s’adresse par ailleurs à nous en disant : « il fit de vous (humains) l’espèce dominante (khoulafa / khala’if) sur Terre » [27;62 / 6;165]. La remarque spontanée des anges prouve que ceux-ci avaient bien compris ce projet Divin. Ils rétorquèrent en effet : « Y établiras-Tu des êtres qui y feront le mal et y feront couler le sang, tandis que nous Te glorifions, Te louons et Te sanctifions ? » [2;30]. Cette objection, les anges ne l’ont pas formulé pour s’opposer à la volonté Divine, car mieux que quiconque, les anges savent qu’Allah ne se trompe jamais, et que toutes Ses paroles et Ses actes procèdent de Sa sagesse et de Son savoir parfaits. Ce n’est pas non plus une quelconque jalousie vis-à-vis de l’homme qui leur a fait tenir ce propos. Rappelons que les anges sont purs de tout vice. Leur question n’est qu’une preuve de leur sagacité, de leur humilité et de leur soif d’apprendre toujours davantage. Leur remarque dénote aussi leur réprobation totale pour le mal, le désordre, l’injustice, le chaos et la violence que traduit le terme « ifsad » et dont l’apogée est le meurtre (safk al dima).
Allah, dont l’un des quatre-vingt-dix-neuf Noms, est le Pacifique (Al Salam) -et qui n’a pas dans les sources musulmanes, de Nom opposé ou contraire, comme le « vaillant guerrier » – Allah donc, exprime dans une cinquantaine de versets de « l’Ultime Testament » que constitue le Coran, sa condamnation de l’injustice, du chaos, de la violence – ce que le Coran désigne sous le terme « fasad ». Allah décrit le tyran Pharaon [28;4], le vaniteux Qaroun [28 ;77], les pillards de Gog et Magog [18;94], les pervers du peuple de Lot [29;30], tous connus pour leur violence, leur injustice et leur méchanceté, en les qualifiant de « malfaisants » (mouf-sidoun). Allah interdit cette malfaisance : Et ne semez pas le chaos sur Terre après que la concorde ait été établie… [7;56]. Le Coran précise qu’Allah n’aime pas la malfaisance [2;205] et qu’Il n’aime pas non plus les gens malfaisants [28;77]. Le Coran oppose en maints passages malfaisance et bienfaisance (ifsad / islah), en disant par exemple : N’obéissez pas aux outranciers qui font le mal (lit. ‘corrompent la Terre’) plutôt que le bien [26;151-152], Allah distingue celui qui fait le mal (al moufsid) de celui qui fait le bien (al mouslih) [2;220]. Il met en garde ceux qui seraient tentés de semer le chaos et la désolation : observez quelle fut la funeste fin de ceux qui firent le mal [7;86]. Le fait d’être croyants, dépositaires du Message, « partisans de la vérité » ne dispense aucunement de faire le bien et n’autorise nullement à faire le mal, bien au contraire. Allah nous a mis en garde à travers l’exemple d’un peuple croyant avant nous, qui est tombé dans les travers de l’extrémisme et du laxisme, et chez qui la malfaisance a pris le dessus, à certains moments de leur histoire : (…) ‘Par deux fois vous sèmerez la corruption sur terre et vous ferez montre d’un grand orgueil’. Lorsque vint l’accomplissement de la première de ces deux [prédictions,] Nous envoyâmes contre vous certains de Nos serviteurs doués d’une force terrible, qui pénétrèrent à l’intérieur des demeures. Et la prédiction fut accomplie… [17;4-5]. Enfin, Allah parle dans la troisième page du Coran, de ceux qui disent croire en Allah et au Jour Dernier tandis qu’en fait ils n’y croient pas, et qui lorsqu’on leur dit : ne faites pas le mal sur Terre, se défendent en prétendant : non, mais nous œuvrons en fait pour le bien [2;11], et le Coran de conclure : ils sont bel et bien malfaisants mais ne s’en rendent pas compte [2;12].
Quelle est l’origine de ce mal [fasad] ? Le Coran l’attribue aux agissements des hommes qui préfèrent suivre leurs passions, plutôt que de suivre la Révélation et leur raison. Allah dit en effet : Le mal / la corruption sur terre et en mer est apparu(e) du fait des actions humaines et pour qu’ils goûtent des conséquences de leurs actes, peut-être reviendront-ils (sur la manière d’agir) [30;41], si le monde était gouverné par leurs passions, les cieux, la terre, et leurs habitants s’en trouveraient corrompus… Nous leur avons pourtant fait parvenir leur rappel (la Révélation), mais ils s’en détournent [23;71].
Aussi, Allah intervient-Il pour éviter qu’un groupe ne détruise la planète, n’éradique le reste de l’humanité ou n’efface toute trace des anciennes religions. Parfois Il utilise les éléments et catastrophes naturels, comme dans les cas de ‘Ad, de Thamoud, de Madyan, des peuples de Loth et de Pharaon : Nous saisîmes chacun pour son crime : il y eut ceux qui furent pris dans un ouragan, ceux qui furent anéantis par un grand fracas, ceux qui furent emportés dans un glissement de terrain, et ceux qui périrent noyés. Jamais Allah ne fit preuve de la moindre injustice, mais ce sont eux qui furent injustes envers leurs personnes [29;40]. Le plus souvent, Allah fait en sorte que les hommes eux-mêmes s’autorégulent : Si Allah ne repoussait pas les peuples, les uns par les autres, la Terre entière serait détruite, mais la grâce Divine englobe tout le monde [2;251].
Nous comprenons donc finalement que l’Islam condamne totalement et fermement les agissements de certains qui s’illustrent tantôt dans la débauche tantôt dans le crime, tantôt dans les deux, qui revendiquent des titres et des honneurs qu’ils ne méritent aucunement, et qui discréditent le Message et la communauté, desquels ils se réclament ou auxquels on les associe. Et le Prophète (paix et salut sur lui) d’avertir : l’Islam est apparu comme étrange et redeviendra étrange comme à son début, bonheur à ceux que l’on considère comme étranges (…) ceux qui œuvrent pour le bien lorsque la majorité des gens fait le mal [Ahmad].