7:46 - Mardi 16 juillet, 2024

- 9. Muḥarram 1446

Du califat « bien-guidé »


Dans l’article précédent, nous nous étions intéressés aux compagnons du Prophète (Paix et salut sur Lui), qui furent les premiers bâtisseurs de la civilisation musulmane. Ces derniers posèrent les bases d’une société nouvelle, d’une communauté de Foi, dont les règles de vie étaient régies par la Loi Divine. Après la mort du Prophète (Paix et salut sur Lui) (632 EC), ils s’efforcèrent de porter son message au reste de l’Humanité. Aux yeux du monde, la toute jeune communauté musulmane ne possédait ni richesse colossale, ni armée terrifiante, ni avancée technique et scientifique, qui auraient laissé présager la naissance en moins d’un siècle, d’une brillante et puissante civilisation. C’est à l’Islam et au contenu de son message, que les Arabes doivent leur ascension fulgurante sur les devants de la scène mondiale. Djamal Dîn Al Afghâni rappelle très justement : ‘Les premiers musulmans étaient étrangers à toutes les connaissances scientifiques, mais ils avaient pu, grâce à l’Islam, acquérir un esprit philosophique qui leur donnait la possibilité d’être écoutés dans la discussion des affaires mondiales et de discours sur les besoins de l’Humanité’ (discours sur enseigner et apprendre, P243). La période des califes « bien guidés » est à ce titre la période la plus représentative de cette vivacité et de cette richesse de l’esprit. La civilisation musulmane n’était pas encore parvenue à l’apogée de son développement, mais pourtant, hormis l’époque du Prophète, jamais l’Islam ne fut aussi vivant que durant les années du Califat bien guidé. Cette période sert de référence à tous les musulmans, conformément au hadith du Messager de Dieu (Paix et salut sur Lui) : Suivez ma Sounnah ainsi que celle de mes successeurs biens guidés venant après moi (Tirmidhi). Le Prophète(Paix et salut sur Lui) avait également annoncé que le Califat ne durerait que trente années (Ahmad, les Sounan). Dès lors, les savants musulmans ont estimé que les trente années en question couvraient la période où Abou Bakr, Omar, Othman, Ali et Al Hassan furent désignés à la tête des affaires musulmanes.

La succession du Prophète - le calife est celui qui succède au Messager de Dieu. Il a pour rôle de sauvegarder la religion et d’établir la justice entre les hommes. Dieu dit dans son Livre : Ô David, Nous avons fait de toi un « calife » sur la terre. Juge donc en toute équité parmi les gens et ne suis pas la passion (38;26). Le Prophète n’a jamais désigné de manière explicite qui devrait diriger après lui la communauté musulmane. Abou Bakr était le plus savant des Compagnons, le premier des convertis (après khadîja) et c’est lui que le Prophète désigna pour guider la prière, lorsqu’il tomba malade à la fin de sa vie. Abou Bakr fut donc rapidement reconnu par l’ensemble des musulmans comme le premier calife de l’Islam. Lui succédèrent ensuite Omar, Othman, Ali, puis Al Hassan. Tous furent nommés selon la règle de la libre consultation de la communauté (Ach-choura) comme il est écrit dans le Livre de Dieu : (Ceux) qui répondent à l’appel de leur Seigneur, accomplissent la Salat, se consultent entre eux à propos de leurs affaires, dépensent de ce que Nous leur attribuons (42,38). On trouve aussi le hadith : Les croyants sont les témoins d’Allah sur terre (Boukhari). Ainsi, la légitimité du calife fut obtenue après consultation en premier lieu des plus illustres compagnons puis, de toute la communauté musulmane, et après avoir reçu l’allégeance (bay’a) de la majorité. Néanmoins, les modalités de cette concertation n’ont été définies ni par le Coran, ni par la Sounnah, laissant libre court à la communauté de trouver les formes qui seraient les plus adéquates, selon le contexte et selon les intérêts et les besoins de la société.

Les caractéristiques des califes bien guidés- Les quatre califes étaient des exemples de piété et de droiture. Le Prophète (Paix et salut sur Lui) était mort en étant satisfait d’eux, ce qui représente l’honneur suprême auquel puisse parvenir un musulman. Ils possédaient donc toutes les qualités pour être de grands dirigeants

Tout d’abord l’humilité. Lors de son investiture, Abou Bakr s’adressa aux gens en disant : Si j’agis bien, aidez-moi, si j’agis mal corrigez-moi ! (Ibn Ishaq, Sîra). On rapporte aussi qu’un jour, une femme s’opposa publiquement à l’opinion de Omar. Ce dernier dit alors : Une femme a vu juste et Omar s’est trompé.(Ibn Kathir)

Ils avaient aussi un sens prononcé pour la justice. Lors de son premier sermon Abou Bakr dit : Le plus faible d’entre vous sera puissant auprès de moi jusqu’à ce qu’il obtienne son droit. (Ibn Ishaq, Sîra). De même, au début de son califatOthman écrivit aux responsables des provinces musulmanes. Il leur dit notamment : Soyez fidèles dans vos engagements et ne commettez point d’exaction envers l’orphelin, ou le contractuel (Dhimmi) car Dieu sera l’adversaire de celui qui les aurait opprimés.

Ils n’exerçaient pas un pouvoir absolu et confiaient des responsabilités à ceux qui en avaient la compétence et dont l’intégrité était prouvée. Ils transmettaient à leurs sujets le sens de la responsabilité civique en toute chose. Ali dit lors d’un sermon : Craignez Dieu…pour ce qui des droits de Ses serviteurs et de Sa terre ; car vous en êtes responsables, et vous serez questionnés même pour ce que vous aurez fait à la terre et aux animaux.

Ils faisaient preuve d’ascétisme : s’inspirant du Prophète (Paix et salut sur Lui), ils étaient semblables au voyageur qui ne fait que passer sur terre. Ainsi, en 639 EC, une sécheresse frappa l’Arabie durant neuf mois. Omar, alors Calife, ne mangea que du pain et de l’huile, refusant de se nourrir correctement tandis que son peuple souffrait de la faim.

En conclusionnous ne pouvons énumérer ici toutes leurs qualités. Une chose est sûre, les Califes bien guidés avaient tous mesuré la gravité de leur tâche, et tout ce qui fut rapporté à leur sujet concernant leur bonté, leur équité ou encore leur ouverture d’esprit, n’a qu’une seule origine : la crainte de Dieu. Ils nous rappellent, que seul le souvenir dela Suprématie de Dieu et du retour vers Lui, peuvent préserver l’Homme de sa propre vanité et des tentations du pouvoir.

Et Allah sait mieux !


Rubrique: Histoire musulmane