Après avoir consacré un article au nom de Dieu, Allah, nous poursuivons notre thématique par deux autres de Ses noms qui lui sont associés dans la basmala, à savoir, Al Rahman et Al Rahim. L’importance particulière de ces noms est attestée par le fait qu’Allah nous commande, avant chacun de nos actes, de les mentionner dans cette célèbre formule que l’on peut traduire par : au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux (Al Rahman), le Très Miséricordieux (Al Rahim). Ils se retrouvent en introduction de chaque sourate du Coran – sauf Al Tawbah -, et dans les premiers versets de la sourate Al Fatiha, ‘la mère du Coran’. Cette tradition est même antérieure au Prophète Mohammed (paix et salut sur lui) comme le confirme le Coran avec l’histoire de Soulayman, dont la lettre qu’il a envoyée à la reine de Saba, Balqis, fut introduite par la basmala.
Les noms Al Rahman et Al Rahim sont deux superlatifs dérivant du mot rahma, que l’on traduit par miséricorde et qui suggère la bonté, la compassion, la bienveillance, la clémence, etc. On tire d’ailleurs de cette même racine (rahm) les mots signifiant le lien de parenté et l’utérus maternel qui évoquent également la douceur, la tendresse et l’amour.
Selon cette définition, on peut comprendre donc par Al Rahman et Al Rahim, Celui qui fait miséricorde. Nos savants ont toutefois établi une distinction entre ces deux noms.
Ainsi, Al Rahman est un nom qui s’applique exclusivement à Dieu, comme le nom Allah. On trouve d’ailleurs dans le Coran : ‘Dis : invoquez Allah ou invoquez Al Rahman, quelle que soit la façon de l’invoquer, Il a les meilleurs noms’ [17;110]. Al Rahman est Celui dont la ‘miséricorde s’étend sur toute chose’ [7;156]. Il déverse Sa miséricorde et Sa bienveillance, ici-bas, sur toutes Ses créatures sans exception, aux hommes, qu’ils soient croyants ou non, bons ou mauvais, comme aux animaux, aux plantes, etc. En effet, quel que soit le comportement de Ses créatures, Dieu ne cessera jamais de les nourrir, de leur fournir l’air et l’eau nécessaires à la vie, la santé, etc. Le Prophète (paix et salut sur lui) nous dit : ‘Dieu a divisé la miséricorde en cent parties. Il en a fait descendre 1% sur terre. C’est par celle-ci que les créatures se montrent de la bienveillance et de la miséricorde, à tel point que la bête soulève son pied au-dessus de son petit par crainte de le blesser.’ [Al Boukhari]
Quant à Al Rahim, en plus d’être un nom divin, il peut aussi désigner un homme doté de miséricorde et de compassion, sans comparaison aucune avec la miséricorde divine. À la différence d’Al Rahman, la miséricorde à laquelle renvoie le nom Al Rahim n’est accordée qu’aux seuls croyants. Elle consiste dans le pardon, l’indulgence, la guidée, la préservation de l’enfer et l’entrée au paradis. En parlant des croyants qui font des bonnes œuvres Dieu dit qu’Il ‘les fera bientôt entrer dans Sa miséricorde, Dieu est Celui qui pardonne, il est Al Rahim’ [9;99].
La miséricorde de Dieu est donc absolue et parfaite, et Ses bienfaits sont illimités, ‘et si vous comptiez les bienfaits d’Allah, vous ne pourriez les dénombrer’ [14;34]. La manifestation la plus éclatante de Sa miséricorde réside dans le fait que Dieu ne cesse de nous accorder pardon et guidée bien que nous soyons injustes et ingrats, ‘si ce n’était la grâce de Dieu et Sa miséricorde [il vous punirait à l'instant] mais Il est Celui qui accueille le repentir, le Sage’ [24;10]. En effet, Allah a décrété pour Lui-même : ‘Ma miséricorde a surpassé Ma colère’ [Mouslim]. Ainsi, plutôt que de nous châtier sans délai pour nos fautes, Allah préfère nous pardonner et nous montrer la voie qui mène au succès par le biais de Son Prophète (paix et salut sur lui) qu’Il n’a envoyé que comme une miséricorde pour l’Univers [21;107], et du Coran ‘qui est un éclaircissement de toute chose, un guide, une miséricorde et une bonne annonce pour ceux qui se sont soumis’ [16;89].
Ceci étant dit, le serviteur de Dieu, bénéficiaire de Ses bienfaits, est également son représentant (khalifa) sur terre, et il se doit, à ce titre, de se parer, dans la mesure du possible, des qualités divines en l’occurrence de la miséricorde.
Or, alors que nos conditions de vie ne cessent de s’améliorer et que nous faisons des progrès scientifiques et techniques à un rythme jamais vu dans l’histoire, et ceci par la miséricorde d’Allah, nous constatons que les hommes, devant cette abondance, deviennent de plus en plus égoïstes, cupides et intolérants. Il est donc temps pour le musulman de revenir à l’essentiel et de s’identifier de nouveau à Son Seigneur en adoptant cette qualité sublime qu’est la miséricorde. Ce n’est qu’à cette condition qu’il pourra prétendre devenir un digne ambassadeur de Dieu sur terre, à l’image de Son Messager (paix et salut sur lui) : ‘C’est par une miséricorde d’Allah que tu as été doux envers eux. Si tu avais été rude, au cœur dur, ils se seraient éloignés de toi’ [3;159]. Il n’est pas concevable d’espérer gagner le cœur des gens par l’arrogance, le mépris, l’agressivité et la violence, ‘Dieu est bienveillant et il aime la bienveillance. Il accorde par bonté ce qu’Il n’accorde pas par dureté.’ [Mouslim].
On constate malheureusement cette absence de miséricorde au sein même de la communauté musulmane. Ainsi, les liens de parenté, qui sont la base de la miséricorde, sont rompus sans raison, les couples se séparent pour un oui ou pour un non, et les musulmans se déchirent entre eux pour des divergences dérisoires, formant une multitude de groupes se détestant les uns les autres.
Le Prophète (paix et salut sur lui) nous donne pourtant le remède au durcissement des cœurs dans cette parole : ‘fais miséricorde à l’orphelin, caresse sa tête, donne-lui de la nourriture, alors ton cœur s’attendrira et tu obtiendras ce dont tu as besoin’ [Al Tabarani, auth. Al Albani]. Il nous faut donc cultiver les bonnes actions en s’assurant au préalable de s’éloigner de l’excès des plaisirs et des loisirs qui nous détournent de notre objectif et de notre nature première.
Il suffit en conclusion de rappeler que ‘Dieu ne fait pas miséricorde à celui qui ne fait pas miséricorde aux hommes’ [Al Boukhari].