Le croyant ne doit pas s’angoisser face à la maladie ou la mort, même si la nature est incontrôlable, mais il doit endurer autant que possible : soit pour chercher une récompense à ce qu’il subit, soit pour montrer son agrément au décret ; et ce ne sont que de brefs instants éphémères. Que celui qui a été guéri d’une maladie réfléchisse sur les moments durant lesquels il s’angoissait : où sont-ils lorsqu’on est en bonne santé ? L’épreuve a disparu et la récompense est arrivée, de la même manière que disparaît la douceur des plaisirs illicites et ne reste que le pêché, ou encore que passe le moment ou l’on se courrouce face aux décrets divins pour laisser place au blâme. La mort est-elle autre chose qu’une douleur grandissante que l’âme ne peut supporter et qui ensuite disparaît ?
Le malade doit se figurer l’existence du repos après le passage de l’âme, et cela amoindrira ce qu’il ressent, de la même manière qu’il doit s’imaginer la santé en buvant un remède amer.
Il ne faut pas que le désespoir apparaisse en se souvenant de l’épreuve, car c’est là le propre du corps alors que l’âme est soit au Paradis soit en Enfer. Il faut uniquement se préoccuper de ce qui élève dans les degrés de la vertu avant que survienne un obstacle qui empêche d’y parvenir. Le bienheureux est celui qui tire profit de sa santé, qui choisit de parvenir à ce qui est le meilleur tant qu’il est encore temps. Qu’il sache que l’élévation en degrés au Paradis est fonction de l’accroissement des vertus ici-bas, mais l’existence est courte et les vertus nombreuses, qu’il s’empresse donc autant qu’il le peut. Comme est long le repos suite à cette fatigue ! Comme est grande la joie de celui qui s’en souciait ! Comme est grand le bonheur de qui s’attristait ! Se figurer l’éternité de la délectation au Paradis, sans trouble, ni interruption, amoindrira toute épreuve et difficulté.
Tiré des pensées précieuses d’Ibn Al-Jawzi