6:05 - Dimanche 22 décembre, 2024

- 20. Jumādā al-Ākhira 1446

La grande calomnie


À la suite des quelques évènements que nous avons cités précédemment, la sécurité était de nouveau assurée à Médine, et les actes d’hostilité manifestes tant extérieurs qu’intérieurs avaient cessé. Un vent de tranquillité soufflait sur Médine, mais il demeurait cependant un ennemi dont l’inimitié n’était pas déclarée, qui manifestait son appartenance à la jeune communauté dès qu’il le pouvait, et qui, à la fois, semait le doute dans le cœur des musulmans dès qu’il en avait l’occasion. C’est ainsi qu’avant chaque prêche du vendredi, Abdoullah ibn Oubayy, l’ennemi d’Allah, le fourbe, se levait à l’arrivée du Prophète pour dire : ‘L’homme devant vous est le Messager d’Allah. C’est par lui qu’Allah vous honore et vous renforce. Apportez lui aussi bien votre secours que votre assistance. Ecoutez-le et obéissez-lui’. Pourtant, dans le même temps, ce même Ibn Oubayy lança, en toute discrétion, une véritable campagne de dénigrement à l’encontre du Prophète  visant à nuire à son intégrité, jusqu’à semer le trouble au sein même de son foyer, remettant implicitement en cause son statut de Messager et de chef.

Ainsi, au retour d’une expédition au cours de laquelle il avait déjà tenté de monter les musulmans les uns contre les autres en vain, le Prophète paix et salut sur lui, étant intervenu in extremis pour calmer les esprits, Ibn Oubayy propagea une calomnie infâme visant la propre femme du Messager , la mère des Croyants, ‘Aïsha. Cette dernière voyageait alors dans un palanquin fixé à l’aide de cordes sur un chameau. Au moment de reprendre le départ lors de la dernière halte avant d’arriver à Médine, ‘Aïsha tarda à rejoindre le groupe, recherchant un collier qu’elle avait fait tomber dans un endroit isolé du campement, au point que les hommes se mirent en route sans se rendre compte qu’elle n’était plus dans son palanquin. Elle resta donc sur place, enroulée dans sa tunique à attendre que l’on revienne la chercher lorsque Safwan Ibn al Mu’attil al Salmi, qui était resté à l’arrière passa à proximité, la reconnut et la fit monter sur sa monture pour rattraper le groupe, sans échanger le moindre mot avec elle, par respect et par pudeur. C’est au moment où on les vit rejoindre tous deux le reste des musulmans qu’Ibn Oubayy osa propager cette odieuse rumeur qui accusait les deux retardataires d’avoir commis un acte qui ne sied ni aux femmes du Prophète, ni à ses compagnons ! La rumeur ne tarda pas à se propager dans tout Médine, et tous les habitants furent bientôt au courant, à l’exception de ‘Aïsha elle-même à qui personne n’osa parler, et ce pendant près d’un mois durant lequel le Prophète paix et salut sur lui, se montra très distant contrairement à son habitude, n’ayant pas reçu de révélation à ce sujet.

Quand notre mère, ‘Aïsha fut mise au courant de ce qui se disait sur elle, elle tomba dans une profonde tristesse, et le Prophète se décida à l’interroger pour éclaircir la situation, sur quoi elle répondit : ‘(…) si je reconnais ce que disent les gens – et Dieu sait que je suis innocente – je dirais ce qui n’a pas eu lieu ! Si je nie ce qu’ils avancent, vous ne me croirez pas’, puis elle cita les paroles du prophète Ya’coub : ‘Oh ! Belle patience ! C’est Allah qu’il faut appeler au secours contre ce que vous racontez !’ [12;18] [Al Boukhari]. C’est ce moment qu’Allah, dans Sa grande sagesse, choisit pour faire descendre la révélation sur Son Messager, qui ne tarda pas à faire la bonne annonce à sa femme : ‘Apprends la bonne nouvelle Aïsha ! Dieu le Très Haut a révélé ton innocence’.

En effet, Allah a consacré tout un passage dans la sourate La Lumière (Al-Nour), pour laver l’honneur de ‘Aïsha, qu’Il qualifie de ‘femme vertueuse, chaste [qui ne pense même pas à de telles choses] et croyante’ [24;23] ; et rétablir la sérénité dans la maison du Prophète paix et salut sur lui. En plus de cela, Allah a fermement condamné ceux qui étaient à l’origine de la calomnie tout comme ceux qui les ont écoutés et qui ont ensuite diffusé les propos mensongers. ‘Quand vous colportiez la nouvelle avec vos langues et disiez de vos bouches ce dont vous n’aviez aucun savoir; et vous le comptiez comme insignifiant alors qu’auprès d’Allah cela est énorme. Et pourquoi, lorsque vous l’entendiez, ne disiez-vous pas : ‘Nous ne devons pas en parler. Gloire à Toi (Ô Allah) ! C’est une énorme calomnie’ ? Allah vous exhorte à ne plus jamais revenir à une chose pareille si vous êtes [de vrais] croyants’ [24;15-17].

Rappelons que la calomnie est l’arme des faibles d’esprit, et celui qui prête attention aux propos sans fondements se rend complice d’une injustice, et ‘il suffit à l’homme pour être menteur de rapporter tout ce qu’il entend’ [Mouslim]. Aussi, le mensonge est à l’opposé des caractéristiques du croyant, et il faut par tous les moyens s’en préserver ; on interrogea le Prophète à ce sujet : ‘Le croyant peut-il être lâche ? Il a dit : oui ! On lui a demandé : Le croyant peut-il être avare ? Il a dit : oui ! On lui a demandé : Le croyant peut-il être menteur ? Il a dit : non !’ [Malik]. Enfin, préserver l’honneur des musulmans et encourager à la bonne entente et la fraternité entre eux, font parties des actions les plus méritoires auprès d’Allah, ‘Celui qui repousse les fausses allégations qui nuisent à la bonne réputation de son frère, Dieu repousse le Feu loin de son visage, le jour de la résurrection’ [Al Tirmidhi]. Tout ceci est d’autant plus vrai à l’heure où nous recevons une multitude d’informations, souvent difficilement vérifiables, que l’on s’empresse pourtant de diffuser sans même penser à contrôler leur authenticité. Ce genre de comportement va à l’encontre de celui loué par le Prophète paix et salut sur lui, contribue à la désunion de notre communauté et pourra avoir pour la personne des conséquences bien malheureuses le Jour du Jugement.


Rubrique: La vie du Prophète (psl)