5:15 - Dimanche 22 décembre, 2024

- 20. Jumādā al-Ākhira 1446

La mort


Allah le Très Haut dit : Toute âme devra ‘goûter’ la mort, ensuite, c’est à Nous que vous reviendrez [29;57], Où que vous soyez, la mort vous atteindra, quand bien même vous réfugieriez-vous dans des forteresses imprenables [5;78], et lorsque la mort atteint l’un des vôtres, Nos émissaires recueillent son âme sans jamais manquer à leur tâche [6;61], L’Ange de la mort qui est chargé de vous, vous fera mourir. Ensuite, vous serez ramenés vers Votre Seigneur. Si tu voyais alors les criminels [comparaître], têtes basses devant leur Seigneur ! ‘Notre Dieu, Nous avons vu et entendu, renvoie-nous donc [sur Terre] afin que nous puissions faire du bien ; nous croyons désormais avec certitude [32;11&12].

Le Coran évoque souvent  cette étape incontournable de notre existence, qu’est la mort, et qui marque la fin de notre passage sur Terre, dans la demeure de la mise à l’épreuve et de l’action, pour rejoindre l’autre monde, qui est celui du Jugement et de la rétribution. La mort, dans l’Islam, est l’une des quatre étapes transitoires, avec l’insufflation dans le fœtus, la naissance et la Résurrection, durant laquelle l’âme humaine quitte un univers pour un autre et un état pour un autre. La mort n’est pas un sujet tabou dans l’Islam. Au contraire, le Prophète, paix et salut sur lui,recommandait de penser ou d’évoquer souvent celle qui mettrait fin aux plaisirs [Tabarani, 'isnadouh djayyid'], désignant par là, la mort. Cela n’a pas pour objectif de nous faire vivre dans une atmosphère morbide et déprimante, mais plutôt de nous rappeler le caractère éphémère de cette vie, afin qu’elle ne nous détourne pas du but de notre création, qui est l’adoration d’Allah, et afin que nous nous préparions plus sérieusement au Jugement, en pratiquant les œuvres salutaires et en faisant du bien. Lorsque l’on demanda à l’Envoyé d’Allah, paix et salut sur lui, qui étaient les hommes les plus sages et les plus à poigne, il répondit, paix et salut sur lui : Les plus prompts à se rappeler la mort et à s’y préparer. Ceux-là ont gagné la dignité ici-bas et l’honneur dans l’au-delà [Tabarani, 'isnadouh djayyid'].

Penser souvent à la mort ne signifie pas pour autant qu’on doive la souhaiter. En effet, le Prophète, paix et salut sur lui, a dit : Qu’aucun des vôtres n’en viennent à souhaiter mourir à cause d’un mal qu’il supporte. S’il devait en arriver là malgré tout, alors qu’il se contente d’implorer Dieu en disant : Mon Dieu, prolonge ma vie aussi longtemps qu’elle est un bien pour moi, et reprends moi auprès de Toi dès lors que Tu sais que cela vaut mieux pour moi [Al Boukhari & Mouslim].

Avant la mort. Lorsque l’on visite une personne mourante, encore consciente et capable de parler, nous devons l’encourager à répéter régulièrement, mais sans exagérer, la première chahadda comme nous l’a recommandé le Prophète, paix et salut sur lui : Rappelez à vos mourants la parole : Il n’y a de divinité qu’Allah [Mouslim] car toute personne dont [elle est] la dernière parole entrera au Paradis [Abou Daoud, auth. Al Hakim]. Il est conseillé également de leur réciter Ya-Sin, la 36ème sourate du Coran, car l’Envoyé d’Allah, paix et salut sur lui, dit : Ya-Sin est le cœur du Coran, quiconque la récite par amour pour Dieu et par désir de l’au-delà sera absout. Récitez là pour vos morts. Ibn Hibban, qui authentifie ce hadith, précise : Par ‘vos morts’, il voulait signifier ‘vos mourants’.

Une fois que la personne a rendu l’âmenous devons lui fermer les yeux comme le fit le Prophète, paix et salut sur lui,  lorsque mourut Abou Salama. Il dit à cette occasion que lorsque l’âme quitte le corps les yeux la suivent [Mouslim].Nous devons ensuite le couvrir d’un drap en attendant son lavage. Il faut aussi payer ses dettes, avec les fonds de la zakat, si nécessaire, car l’âme du musulman reste subordonnée à sa dette jusqu’à ce que l’on s’en acquitte pour lui [Ahmad, Al Tirmidhi & Ibn Majah]. Cela signifie que son cas reste suspendu et qu’il n’est pas jugé tant que sa dette n’est pas payée ! Enfin, il faut le laver, l’embaumer dans un linceul, prier sur lui, et l’enterrer rapidement, le Prophète, paix et salut sur lui,disant : Ô Ali ! Sache que trois choses ne sauraient être retardées lorsqu’elles se présentent : la prière, les funérailles et le mariage de la femme qui trouve un mari capable de l’entretenir [Ahmad & Al Tirmidhi].

Le lavage. C’est à l’un des proches qu’il incombera d’effectuer le lavage du défunt. Il s’agira alors de nettoyer le corps avec de l’eau et du savon, avec délicatesse, de la même manière que pour les grandes ablutions, mais en cachant l’intimité du défunt. Ensuite, on embaumera le corps dans trois ou cinq pièces de tissu blanc, selon qu’il s’agira, respectivement, d’un homme ou d’une femme.

Les funérailles. Le Prophète, paix et salut sur lui, a incité les croyants à assister aux funérailles en disant : Quiconque suit un convoi funèbre et accomplit la prière sur le mort aura un ‘qirat’ et quiconque y assiste jusqu’à la fin de l’enterrement aura deux ‘qirat’. Lorsqu’on l’interrogea sur ce qu’étaient ces deux ‘qirat’, il expliqua qu’ils étaient comme deux énormes montagnes [de récompense] [Al Boukhari & Mouslim]. On rapporte que lorsqu’Ibn Omar entendit Abou Hourayra évoquer ce hadith, il partit aussitôt s’enquérir auprès de Aïcha, qu’Allah soit satisfait d’eux, de l’exactitude de ce propos. Celle-ci confirma, et Abdallah Ibn Omar de rétorquer : Combien de qirat avons-nous donc perdu par négligence ! Si l’Islam insiste à ce que les croyants prennent part au cortège funèbre c’est afin de rendre hommage au mort et d’intercéder pour lui, tout d’abord, afin que les gens négligeant aient une occasion de se ressaisir en voyant le cortège, ensuite, afin de soutenir les proches et enfin pour favoriser la cohésion et la solidarité dans la communauté. Nul ne doit élever la voix, en suivant le cortège, quand bien même ce serait pour prononcer des prières.

La prière sur le mort et l’enterrement. La prière sur le mort musulman est une obligation collective [fard  kifaya]. Si un groupe de croyants s’en acquitte, le reste de la communauté en est déchargé. Nul ne peut s’y soustraire sous prétexte que le mort aurait été un ‘mauvais musulman’ ou un ‘innovateur’. Et quand bien il s’agissait d’une personne s’étant suicidée, d’un voleur ou d’un assassin, refuser de prier sur lui, à cause de cela constituerait un grand péché, comme le soutient Ibn Hazm, rapportant l’accord d’Ata, d’Ibrahim al Nakhai, de Qatada, d’Ibn Sirin et d’autres parmi les élèves des compagnons [tabi'in]. La prière sur le mort se fait face à son corps. Les fidèles, en état de purification rituelle, essaieront de constituer trois rangs, afin de favoriser l’absolution du mort [hadith ‘Al Shab al Sounan’, auth. al Hakim],puis prononceront derrière l’Imam les quatre takbirat [Allaho akbar] sans s’incliner et sans se prosterner, en récitant les invocations de circonstance. Enfin, la dépouille sera mise en terre : N’avons-nous pas fait de la Terre, un espace propre à les accueillir tous, vivants et morts [78;25-26]. On devra dans la mesure du possible tourner le corps sur le flanc droit, la face vers la Qibla ou sur le dos, la plante des pieds et, le visage légèrement redressé, vers la Qibla, comme le suggèrent les savants. Al Bayhaqi  rapporte à ce sujet un hadith  dans lequel Omar dit de la Kaaba : Allah a fait de toi une direction vers laquelle nos vivants prient, et vers laquelle nous enterrons nos morts [Sahih]. Notons cependant, qu’à ce sujet, rien n’est obligatoire.

Le comportement des proches face à la mort. La nouvelle doit être annoncée et reçue avec décence. Les cris, les hurlements, le fait de déchirer ses vêtements, de se raser la tête, de se porter des coups, ou de glorifier le mort, sont des actes bannis, interdits, et propres à la période antéislamique. Il n’y a aucun mal, évidemment à ressentir du chagrin ou à pleurer, comme ce fut le cas du Prophète, paix et salut sur lui, lorsqu’il perdit son fils Ibrahim, sa petite fille Oumayma, son cousin Ja’far, ou lorsqu’il se tint devant le corps de Mossab Ibn Oumayr. Au contraire, ces pleurs sont un bon signe, car ils proviennent d’une miséricorde qu’Allah a placé dans le cœur de ce qu’Il a voulu d’entre ses serviteurs et qu’Il sera miséricordieux avec ceux qui sont miséricordieux [Al Boukahri & Mouslim]. Notons qu’il est réprouvé de se rassembler chez la famille du défunt ou que celle-ci prépare un repas, car cela est un héritage de la Jahiliya [Période préislamique]. Au contraire, ce sont les proches qui devraient préparer à manger pour la famille en deuil, comme le suggère l’imam Al Shafii dans son commentaire du hadith : Préparez à manger pour la famille de Ja’far car elle traverse un moment difficile [Abou Daoud, Ibn Majah, auth. Al Tirmidhi].

Enfin, les personnes affligées par la disparition d’un proche doivent s’en tenir à la formule coranique : D’Allah nous venons à Lui nous retournons [inna lillahi wa inna ilayhi rajioun] [2;156]. Ibn Abbas, qu’Allah soit satisfait de lui, commente le verset d’où est tiré cette formule en disant que lorsque le croyant se soumet à la volonté Divine, revient à Lui, et proclame qu’il appartient à Allah et qu’à Lui il retournera, on porte à son actif trois bonnes œuvres : la bénédiction Divine, la miséricorde et la guidée.

Et fais la bonne annonce aux endurants, *qui lorsqu’un malheur s’abat sur eux, disent : Certes nous sommes à Allah, et c’est à Lui que nous retournerons.*Ceux-là reçoivent des bénédictions de leur Seigneur, ainsi que la miséricorde ; et ceux-là sont les biens guidés.

Et Allah sait mieux !


Rubrique: Bien comprendre l'Islam