Le siège de Médine
4000 opposants, venus d’Égypte et d’Iraq, fédérés par Ibn Saba, se mirent d’accord pour profiter de la période du pèlerinage pour rejoindre Médine et assiéger la maison d’Othman. Ils prirent d’assaut la mosquée du Prophète (paix et salut sur lui) et y imposèrent leur imam, Oubaydallah Ibn Adiy pour y diriger la prière à la place d’Othman.
Les fidèles du Calife demandèrent à celui-ci s’ils devaient ou non prier derrière l’imam des insurgés. Othman eut cette réponse tout à fait extraordinaire au vue de la situation : « La prière est sans conteste la meilleure chose que puissent faire les gens, associez-vous donc à eux dans ce qu’ils font de bien » [Al Boukhari].
Du haut de l’estrade de l’Envoyé d’Allah (paix et salut sur lui), Ibn Adiy dénigra Othman dans le prêche du Joumou’a. Othman fut choqué lorsqu’on lui rapporta les calomnies répandues à son encontre et ne put s’empêcher de s’exclamer : « j’étais le 4ème homme dans l’Islam et le Prophète m’a donné en mariage tour à tour ses deux filles ! ».
La position des compagnons
Ibn Asakir rapporte qu’Ali envoya une missive à Othman pour lui proposer de lever un contingent de 500 hommes afin de lui porter secours, ce à quoi répondit le Calife : « puisses-tu être récompensé généreusement mais je ne veux pas que le sang soit versé à cause de moi et ne veux pas être non plus le premier successeur de Mohammad à user de violence contre sa population ».
D’autres compagnons proposèrent au Calife de l’exfiltrer à Mekka ou au Cham, mais cela ne lui convenait pas non plus : quitter la terre dans laquelle il avait émigré avec le Prophète (paix et salut sur lui), abandonner la capitale aux insurgés, ou risquer de déporter le conflit dans le haram, ces solutions n’étaient pas acceptables à ses yeux.
Othman trouva finalement le conseil qu’il attendait du sage compagnon Abdallah Ibn Salam qui lui dit : « abstiens-toi de toute violence, tes détracteurs n’auront rien à arguer (le jour du jugement) » [Ahmad].
Patience
Céder à la pression en renonçant à sa fonction était tout aussi hors de question. Le Prophète (paix et salut sur lui) l’avait en effet exhorté des années plus tôt : « Allah te revêtira d’une parure dont les hypocrites chercheront à te dépouiller, ne l’enlève sous aucun prétexte » [Al Tirmidhi].
Ibn Taymiyya apporte le témoignage suivant : « il est établi qu’Othman fut le dirigeant le plus pacifique, qu’il fut le plus patient face aux calomnies et à la haine de ses détracteurs. Il avait conscience que sa vie était en danger, pourtant il s’interdit l’option répressive bien qu’il en eut les moyens ».
L’assaut
Othman mandata Ibn ‘Abbas pour conduire à sa place le pèlerinage en lui demandant d’informer les pèlerins de la situation. Le cousin de l’Envoyé (paix et salut sur lui) objecta que sa place était auprès du Calife pour combattre les insurgés, mais il obtempéra finalement à la volonté d’Othman qui tenait à ce que le rite du pèlerinage soit accompli.
On rapporte que le matin du jour où il allait être assassiné Othman confia à sa famille avoir vu le Prophète (paix et salut sur lui) en rêve lui recommander de jeûner, lui annonçant qu’il romprait son jeûne auprès de lui, d’Abou Bakr et de ‘Omar (au Paradis).
Le 18/12/35H. Othman fut lâchement assassiné alors qu’il lisait le Coran. Il avait 82 ans. Deux de ses fils périrent également durant l’assaut. La maison califale et le Trésor public furent pillés par les assaillants.
L’Imam Al Nawawi confirme qu’aucun compagnon ne prit part à l’insurrection et à plus forte raison au meurtre du Calife.
Aïcha fut interrogée au sujet d’Othman, sur qui continuait à circuler de nombreuses calomnies même après sa mort. Fidèle à elle-même et à son caractère entier, la mère des croyants s’exclama : « Maudit soit qui le maudit ! J’étais présente lorsque le Prophète (paix et salut sur lui) recevait la révélation puis qu’il dictait celle-ci à Othman. Seule une personne aimée d’Allah et de son Prophète (paix et salut sur lui) a pu avoir cet honneur ».
Ali dit quant à lui : « cet homme était connu comme l’homme aux deux lumières ; il fut deux fois le gendre du Prophète (paix et salut sur lui) qui lui promit le paradis ».
Le Coran dans la vie d’Othman
Othman était un « amoureux du Coran ». Ibn Hajar rapporte qu’il fut de ceux qui mémorisèrent et récitèrent intégralement le Coran au Prophète (paix et salut sur lui) avant la mort de celui-ci. C’est aussi lui qui nous a rapporté cette parole de l’Envoyé d’Allah (paix et salut sur lui) : « Le meilleur des hommes est celui qui a appris le Coran puis qui l’enseigne à son tour ».
On rapporte de lui ces paroles : « si nos cœurs étaient purs, jamais nous ne pourrions nous lasser du Coran ». Il dit encore : « combien détestable serait un jour passé sans lire le Coran ». Il concédait également aimer trois choses en cette vie : « nourrir un affamé, vêtir une personne dénudée, et psalmodier le Livre d’Allah Exalté ».
Parmi les paroles de sagesse que l’on rapporte d’Othman, nous pouvons citer celle-ci : « il y a quatre choses qui ne paraissent que méritoires tandis qu’en fait elles sont obligatoires : il est bien de côtoyer les personnes vertueuses mais les prendre pour modèle est vital ; il est bien de lire le Coran, mais le traduire dans la pratique est nécessaire, il est bien de visiter les tombes, mais se préparer à la mort est obligatoire ; visiter le souffrant est bien, mais lui réclamer une exhortation est primordial ».
Rapportons enfin de lui qu’il considérait comme autant d’occasions ratées : « un savoir qui n’est pas mis en pratique, un exemplaire du Coran que l’on possède mais qu’on ne lit pas, et une longue vie dont on ne profite pas pour préparer le long voyage qui nous attend ensuite vers l’au-delà ».
Ô Allah accorde à Othman ta pleine satisfaction !