16:25 - Samedi 21 décembre, 2024

- 19. Jumādā al-Ākhira 1446

S’écarter des innovations


Allah le Très Haut affirme que Sa religion, l’Islam, est parfaite, et ne souffre d’aucun défaut, pas plus que d’un manque à combler lorsqu’Il dit dans l’un des derniers versets révélés : Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous Mon bienfait. Et J’agrée l’Islam comme religion pour vous [5;3]. Il dit de plus : Nous n’avons rien omis dans le Livre [6;38], c’est-à-dire dans le Coran, et vraiment Ton Seigneur n’oublie rien [19;64]. Cela signifie que l’ensemble des règles et des principes de l’Islam se trouve dans le Coran, et ceux-ci ont été incarnées et explicitées de la meilleure façon par l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, : Ainsi, Nous avons envoyé parmi vous un messager des vôtres qui vous récite Nos versets, vous purifie, vous enseigne le Livre et la Sagesse et vous enseigne ce que vous ne saviez pas [2;151]. C’est donc dans le chemin tracé par le Prophète, paix et bénédictions sur lui, qu’il nous faut marcher sans s’écarter de sa voie : Dis [ô Mohammad] : Si vous aimez Allah sincèrement [ô musulmans !], suivez-moi, alors Allah vous aimera et vous pardonnera vos péchés [3;31], Et telle est ma voie en toute rectitude : Suivez-la et ne suivez pas les chemins qui vous écarteraient loin de Sa voie [6;153]. C’est dans la continuité de ces versets que le Prophète, paix et bénédictions sur lui, a dit lors de son pèlerinage d’adieu : Je vous laisse deux ‘choses’, quiconque s’y accroche ne s’égarera pas : il s’agit du Livre d’Allah [le Coran] et de Ma Tradition [Sounnah] [Rap. Malik : Al Mouwata, & Al Hakim : auth. par Al Albani]. Une autre fois, l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, fit à un groupe de ses compagnons la recommandation suivante : Accrochez-vous à ma Tradition et à celle des califes droits et bien guidés. Agrippez-vous y de toutes vos forces, et méfiez-vous des innovations car chaque innovation est une cause d’égarement [Abou Dawoud auth. par Al Albani].

Ainsi, l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, a-t-il définit l’innovation, comme ce qui s’oppose à sa Traditionet à celle des quatre califes bien-guidés que sont Abou Bakr, Omar, Othman, et Ali, qu’Allah les agrée ! Il mettait souvent en garde contre l’innovation, comme le rapporte Jabir : Quand le Messager d’Allah, paix et bénédictions sur lui, faisait un discours, ses yeux devenaient rouges, sa voix s’élevait et sa colère devenait grande (…)  Il disait : Le meilleur discours est le Livre d’Allah, la meilleure direction est celle de Mohammad et les pires choses sont les créations nouvelles [dans la religion] et toute innovation est source d’égarement [Mouslim]. L’innovation [al bid’a] est proscrite uniquement dans la sphère religieuse et en aucun cas dans les affaires de la vie courante, comme en témoigne la Sira du Prophète, paix et bénédictions sur lui, et celle des Califes bien-guidés après lui. C’est forts de cette compréhension que les musulmans des premiers siècles se sont illustrés par les inventions dans les domaines de la science et de la technique.À l’inverse, dans la religion, la règle est de s’en tenir à ce qu’Allah a révélé et à ce que le Prophète, paix et bénédictions sur lui, a laissé comme exemple à suivre : En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle, pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquemment [33;21], Que ceux, donc, qui s’opposent à son commandement prennent garde qu’une épreuve ne les atteigne, ou que ne les atteigne un châtiment douloureux [24;63] ! Donc la règle, dans toute œuvre d’adoration est de s’appuyer sur un Texte explicite et authentique, du Coran ou de la Sounnah, selon l’interprétation qu’en ont faite, soit le Prophète, paix et bénédictions sur lui,, soit ses compagnons, soit enfin, les savants reconnus de la communauté. C’est ainsi seulement que l’Islam a pu et pourra rester indemne, par la permission d’Allah, de toute altération.

Donc, dès lors que nous voyons une personne qui adore Allah d’une manière que ni le Coran ni les hadiths authentiques n’autorisent, mais qui ne s’appuie que sur sa passion, nous devons rejeter son acte, puisque l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, dit selon Aïcha : Celui qui apporte dans notre affaire que voici [i.e. l’Islam]  ce qui n’en fait pas parti, il faut alors le rejeter [Al Boukhari & Mouslim]. Bien sûr il faut laisser les gens de savoir lui adresser le conseil avec sagesse et avec force d’arguments Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés [16;125]. Il faut éviter d’empirer la situation ou de risquer d’entraîner un mal plus grand, à l’instar d’Aaron, le frère de Moïse, qui n’intervint pas lorsqu’une partie du peuple se mit à adorer le Veau d’or, et ce afin d’éviter une division et un conflit qui aurait pu dégénérer entre les tribus [Voir Coran 20 ; 92 à 94].

Y a-t-il de bonnes innovations ? Allah n’a rien omis de révéler et son Prophète, paix et bénédictions sur lui, a fidèlement transmis le message. Cependant, il se peut qu’à une époque donnée, et dans un contexte particulier, les Imams-savants puissent mettre en place des moyens licites pour atteindre un objectif religieux, même si ce moyen n’a pas été directement utilisé par l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui,. Ceci à condition que les Textes authentiques l’autorisent ou y encouragent, tout d’abord, que des savants reconnus instituent et agréent cette méthode, ensuite ; et que cela ne soit enfin pas l’occasion de violer des commandements. C’est ainsi que l’explique l’Imam Al Shafi’i, que la miséricorde d’Allah soit sur lui Toute chose innovée qui contredit le Livre, la Sounnah, le consensus des savants, ou ce que l’on rapporte d’authentique des compagnons est une innovation blâmable qui conduit à l’égarement. Par contre, toute chose innovée qui ne les contredit en rien est une innovation louable.

C’est ainsi qu’Omar institua la prière de tarawihque les musulmans pratiquent à travers le monde, durant le mois de Ramadan. Omar s’est appuyé sur un fait établi, que l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, avait dirigé la prière surérogatoire en groupe, quelques soirs durant le mois de Ramadan, mais ne l’a jamais fait de manière continue, afin que celle-ci ne devienne pas une obligation pour les musulmans. Durant son Califat, Omar, vit que les musulmans priaient chacun pour eux, ou par petits groupes dans les mosquées, pendant les soirées de Ramadan, ce qui provoquait une sorte de cacophonie. De plus, il savait et avait compris qu’Allah aime voir ses serviteurs se réunir pour L’adorer, comme en témoignent de nombreux versets et hadith. C’est pour cela qu’il demanda à Oubey Ibn Ka’b de rassembler derrière lui les musulmans et de diriger la prière de tarawih, pendant toute la durée du Ramadan ; chose que l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, n’avait pourtant pas faite.

On pourrait citer également l’interdiction par Omar du pèlerinage dit tamatou’, bien qu’il savait que c’est ainsi que l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, avait recommandé à ses compagnons de faire le pèlerinage. Omar ne l’a fait, passant outre les objections de quelques compagnons moins savants que lui, que parce qu’il voyait qu’en négligeant les deux autres formes permises de pèlerinage, que sont le qiran et l’ifrad, les musulmans privaient la Sainte mosquée de leur présence, durant le reste de l’année, chose qui n’est aimé ni d’Allah ni de son Prophète, paix et bénédictions sur lui,.

Nous pourrions aussi évoquer, le conseil qu’Omar fit à Abou Bakr de faire recenser le Coran sous forme d’un recueil. Le Prophète, paix et bénédictions sur lui, n’a jamais ordonné cela de manière explicite. Mais Abou Bakr suivit le conseil d’Omar, car il savait que l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, avait permis que l’on écrive le Coran sur différents supports de son vivant, et il savait aussi que le but de la religion était de perdurer dans le temps. Il a craint pour l’intégrité du Coran et a donc souhaité qu’il soit compilé. C’est pour cela qu’il délégua cette mission à Zayd Ibn Thabit qui s’en chargea, malgré qu’il fut quelque peu réticent au prime abord, pensant qu’il s’agissait peut-être d’une innovation blâmable. Et Abou Bakr était plus savant et plus sage que Zayd.

Suivant le même principe, il n’y a rien d’illicite et on ne peut qualifier d’innovation le fait de se réunir pour lire sourateal kahf  le Vendredi ou la nuit qui précède le Vendredi, puisque des hadiths authentiques mentionnent le mérite de cette lecture ; ou de se réunir pour réciter les invocations que le Prophète, paix et bénédictions sur lui, avait l’habitude de réciter matin et soir, selon les hadiths sûrs. À l’inverse on ne peut dire que cela est une Sounnah ou blâmer qui n’y participe pas et préfère pratiquer cela tout seul. Cependant, les Textes qui l’autorisent ou qui y incitent sont nombreux, pour quiconque est un temps soit peu versé dans la science du Coran et du hadith ; et les savants qui ont agréé ces pratiques, comme Malik, Al Shafi’i, Abou Hanifa, Al Nawawi, ‘Izz Ibn Abd al Salam, Al Chawkani, Ibn Mouflih alHanbali, ou encore Ibn Tayymiya qui l’autorise avec des conditions, sont largement reconnus et compétents chez les gens de savoir. Le seul but des savants qui ont adopté ces avis et qui l’ont mis en pratique, était et est encore aujourd’hui, de rénover la Sounnah en apprenant aux gens les invocations que récitait quotidiennement l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui, et de les inciter à faire chaque jour ces bonnes œuvres négligées.

De même, le fait de marquer le mois de Rabi al Awalqui est le mois de la naissance de la meilleure des créatures, paix et bénédictions sur lui, en lisant dans les mosquées ou chez soi la vie du Prophète, paix et bénédictions sur lui, n’est en aucun cas une innovation blâmable, au contraire ; cela est très souhaitable à une époque où l’on voit les gens célébrer tout et n’importe quoi, et où nous sommes si ignorants de la vie et de la personnalité du Prophète, paix et bénédictions sur lui,. On ne peut qualifier cela d’innovation blâmable que lorsque cela devient l’occasion de fêtes, accompagnées d’excès, de gaspillage, de propos futiles, de promiscuité et des choses qu’Allah n’aime pas ; ou bien que l’on institue une forme d’adoration particulière le jour de la naissance du Prophète, paix et bénédictions sur lui, ; ou encore que l’on donne autant ou plus d’importance à ce jour qu’à ceux des deux fêtes légales de fin du Ramadan et du sacrifice, comme le font certaines sectes.

Enfin, toutes les innovations rejetées n’ont pas le même niveau de gravité. Certaines touchent au dogme, comme le fait de renier des Attributs d’Allah, à l’instar de ceux qui lisent ce verset : Et construis l’arche sous Nos yeux et d’après Notre révélation [11;37], et disent ‘Non Allah n’a pas d’œil’ ou qui à l’inverse tombe dans l’anthropomorphisme, et s’imaginent qu’Allah ressemble à ses créatures alors que ‘Rien ne Lui ressemble’ [42;11]. Ce fut le cas de celui qui avait interrogé l’Imam Malik sur la manière dont Allah s’était ‘assis’ sur le Trône ; l’Imam Malik lui répondit : Allah s’est installé sur le Trône c’est un fait, y croire est un dogme, et poser la question dessus est une innovation rejetée, puis il le fit sortir de la mosquée. Les innovations qui touchent au dogme sont bien évidement plus graves que celles qui touchent aux piliers, et ces dernières sont plus graves que celles qui touchent aux œuvres méritoires, et ainsi de suite.

Il convient donc que nous sachions reconnaître les innovations religieuses, sans exagérer dans nos jugements en qualifiant tout à tort et à travers de bid’a, et sans que cela nous incite à transgresser dans la manière de rejeter ces dernières ; afin de nous en écarter et de suivre la meilleure des voies qui est celle de l’Envoyé d’Allah, paix et bénédictions sur lui,.

Et Allah sait mieux !


Rubrique: Bien comprendre l'Islam