Au cours de la onzième année de sa mission, le Messager de Dieu, paix et bénédictions sur lui, rencontra des membres de la tribu des Khazraj, non loin de la Mecque à Aqaba. Originaire de Médine, qui se prénommait alors Yathrib, ces derniers bien que polythéistes, avaient entendu parler par l’intermédiaire des gens du Livre, de la venue imminente d’un prophète. L’Apôtre d’Allah, paix et bénédictions sur lui, invita donc ces hommes à embrasser l’Islam et leur récita quelques versets du Coran. Aussitôt, ceux-ci reconnurent le prophète dont ils avaient entendu parler, celui-là même dont la description se trouve au sein des Saintes Ecritures. Ils décidèrent alors de prendre les devants en répondant les premiers à son appel, puis ils repartirent, en se fixant rendez-vous une année plus tard au même endroit.
Le serment d’Aqaba
L’année suivante, douze hommes vinrent à la rencontre du Prophète, paix et bénédictions sur lui, pour se convertir. Celui-ci les convia avec force, à lui prêter serment. Jurez, leur dit-il, de ne rien associer à Dieu, de ne pas voler, ni de commettre l’adultère, ni de commettre la moindre infamie, ni de me désobéir dans ce qui est convenable. Celui qui respecte cet engagement, Dieu le récompensera ; celui qui commet l’un de ces pêchés et qui en est châtié dans ce monde, aura expié sa faute. Mais celui dont le péché reste caché, son affaire incombe à Dieu : Il peut lui pardonner ou le châtier. Oubada ibn Samit, le rapporteur de ce hadith ajoute : Ces paroles nous incitèrent à lui prêter allégeance [Al Boukhari]. Nous voyons ici que l’Islam ne se réduit pas à une simple attestation de foi (chahada), mais qu’il s’agit avant tout d’un véritable engagement vis-à-vis du Seigneur des Mondes, une aspiration profonde visant à soumettre son être entièrement à Lui. Si L’Islam se résumait aux seules paroles, alors plus rien ne distinguerait l’hypocrite de l’homme sincère et bien des tyrans auraient accepté de se soumettre à cette religion car elle n’aurait eu aucune incidence sur leur mode de vie et leur manière de gouverner.
Mous’ab ibn ‘Oumayr
Après cela le Prophète, paix et bénédictions sur lui, chargea Mous’ab ibn ‘Oumayr de partir à Médine pour y prêcher l’Islam et pour enseigner aux convertis la lecture et les préceptes du Coran, ainsi que la prière. A Médine, une guerre fratricide sans fin opposait les Khazraj et les Aws, les deux principales tribus de la ville. D’aucuns, las de cette animosité, espéraient qu’une réconciliation puisse un jour y mettre fin. D’autre part, contrairement à la Mecque, des tribus juives y étaient installées, ce qui avait familiarisé les polythéistes avec l’idée d’une révélation Divine. Tout cela créa un contexte favorable à l’expansion de l’Islam. Quant à Mous’ab, il était originellement l’un des jeunes hommes les plus en vue à la Mecque : il était beau, issu d’une famille riche et distinguée. Lorsqu’il devint musulman, chassé de chez lui, il renonça au luxe et aux honneurs dont il jouissait pour se donner de tout son être à la religion de Dieu. O vous qui avez cru, entrez pleinement dans l’Islam [2,208]. Ce noble compagnon mourut à la bataille d’Ouhoud ne possédant plus rien si ce n’est son unique vêtement. On voulut d’ailleurs en faire son linceul mais il était trop petit et laissait tantôt apparaître sa tête, tantôt ces pieds. Pensant au luxe dans lequel il vécut jadis, le Prophète, paix et bénédictions sur lui, ne put s’empêcher de pleurer de compassion pour son fidèle compagnon. La ferveur sans limites de Mous’ab fut donc déterminante et bientôt, la quasi-totalité des médinois se convertirent à l’Islam. Nous comprenons ici que la responsabilité de diffuser le Message et d’enseigner la religion n’incombe pas au Prophète, paix et bénédictions sur lui, seulement, ni même aux seuls oulama [savants], mais aussi aux croyants qui en sont dignes et capables, et qui ont étudié auprès des gens du savoir, dès lors que leur aptitude est reconnue par les détenteurs de l’autorité religieuse. Appeler les gens à Dieu et au bien est un devoir pour tout musulman responsable, dans la limite du savoir qu’il possède et de ses capacités.
Le second serment d’Aqaba
Un an après, durant la période du pèlerinage, soixante treize hommes et deux femmes vinrent prêter allégeance au Prophète, paix et bénédictions sur lui, et se convertir, toujours à Aqaba. Ce serment reprenait tous les points du premier, auquel s’ajoutait la promesse de défendre le Prophète, paix et bénédictions sur lui, comme sa propre famille, même s’il fallait le payer de sa vie. En échange, le Prophète, paix et bénédictions sur lui, leur promettait le Paradis. Par une intuition Divine, Mohammed, paix et bénédictions sur lui, avait compris que bientôt Allah autoriserait les croyants à se défendre contre les persécutions. L’allégeance se fit dans le secret afin de ne pas provoquer la colère des Quraychites. Le vent semblait tourner. Après ces années de peines et de persécutions, un vent d’espoir se faisait sentir, en provenance de Médine.